La chimie analytique est la branche
de la chimie qui a pour but l'identification, la caractérisation et la
quantification des substances chimiques ainsi que le développement des méthodes
nécessaires à cette analyse. Elle s'intéresse également à la compréhension des
phénomènes mis en jeu dans les processus et les techniques d'analyse afin de
pouvoir sans cesse les améliorer.
La chimie analytique
joue un rôle essentiel dans le contrôle de la qualité des produits, qui est
indispensable pour les industries chimiques, pharmaceutiques et alimentaires ;
dans les problèmes d'environnement (contrôle du taux et de la nature des
substances, polluantes ou non, contenues dans les fumées, les eaux usées, les
déchets industriels ou autres, les résidus d'engrais, d'insecticides ou de
défoliants dans les sols, dans les produits agricoles) ; dans le diagnostic
médical (taux de glucose, d'urée, de fer, de calcium ou de potassium contenus
dans le sang ou l'urine, pH, gaz du sang...)
Et des usages
médicinaux de la chimie analytique nous devons apprendre à connaître quelle est
la technique de résonance magnétique nucléaire
Fixation non
destructive puissante de la structure moléculaire Surtout les sucres
biologiques et traces.
Dépend de la
propriété magnétique de certains atomes (ou noyaux) Y compris le proton (1H),
le carbone (13C) ou le phosphore (31P).
Dans cet exposé, nous discuterons brièvement
d'une théorie Résonance en prenant le modèle vectoriel comme représentation du
noyau. c'est le modèle, facilement accessible à un grand nombre d'utilisateurs,
n'est pas conforme tout à fait réel, mais simplifie grandement représentation
du principe RMN.
1- Définition :
La spectroscopie de résonance magnétique nucléaire (RMN) est
une technique qui permet de déterminer la structure de molécules. Celles-ci mesurent en moyenne quelques nanomètres (un nanomètre valant 10-9 mètres)
et sont trop petites pour être observées de manière directe par un microscope. La
RMN permet de sonder la structure moléculaire en faisant interagir l'aimantation naturelle
des noyaux avec un champ magnétique.
En RMN, l'interaction entre le noyau atomique et le champ
magnétique est quantifiée et seule une fréquence particulière (appelée fréquence de Larmor) permet cette interaction. Cette
fréquence dépend du type de noyau observé (proton, carbone, azote, etc.), mais aussi de
l'environnement chimique de ce noyau, c'est-à-dire des autres noyaux présents
autour, et des électrons impliqués dans la liaison chimique, ce qui signifie par
exemple qu'un proton porté par un groupement méthyle ne résonnera pas à la même
fréquence qu'un proton d'aldéhyde. La fréquence de résonance permet donc de remonter à
la structure de la molécule.
La RMN est maintenant utilisée en routine dans tous
les laboratoires de synthèse, mais son potentiel dépasse largement la simple
détermination structurale. On peut en effet l'utiliser pour mesurer des distances
entre atomes, suivre « en direct » une réaction chimique, mesurer des constantes de diffusion, faire de l'imagerie
médicale (IRM, ou imagerie par
résonance magnétique), etc.
Ce exposé vous
propose de retracer l'histoire de la RMN, ainsi que les dernières avancées au
niveau français. Enfin, vous aurez un aperçu des perspectives qu'offre cette
technique dans un avenir proche avec l'augmentation des valeurs de champ magnétique. Bonne lecture.
Un dossier réalisé par L'actualité
chimique et Alexandre
Zagdoun, doctorant au Centre européen de RMN à Très Hauts Champs de Lyon,
sous la direction de Lyndon Emsley. Son travail consiste à développer de
nouvelles techniques RMN pour l'étude de matériaux et une partie de son temps
est dédiée aux enseignements.
2- Historique :
Depuis
sa découverte en 1945, la RMN a
connu d'incroyables développements technologiques, motivés par la diversité de
ses applications (qui
vont de la physique à
la médecine). Elle est par exemple l'unique méthode capable de déterminer la
structure de protéines en solution. Cet exemple illustre bien
son incroyable potentiel.
Les applications de la RMN ne sont cependant pas limitées à la biologie,
puisque cette technique est aussi bien appliquée à la chimie des matériaux (zéolites, polymères,
cristaux liquides) qu'à la recherche en cosmétique. Elle est
aussi utilisée de manière standard comme outil de diagnostic médical, et trouve
même des applications dans la recherche de nouvelles sources de pétrole.
De fate, les
applications potentielles de la RMN ne sont limitées que par le défi et le coût
du développement de la technologie capable de produire de très hauts champs magnétiques, et par
l'imagination des chercheurs.
En effet, la RMN permet
de sonder la structure et la dynamique des molécules en utilisant des transitions de spins nucléaires.
En l'absence de champ magnétique, ces transitions sont dégénérées (de
même énergie). Elles acquièrent une énergie différente en présence d'un
champ magnétique (effet Zeeman). Le signal RMN est proportionnel à la différence
d'énergie entre ces niveaux, qui est habituellement très faible (dans la gamme
des radiofréquences). L'intensité et la résolution du signal augmentent donc avec le champ magnétique,
motivant ainsi la recherche de champs toujours plus élevés.
Au fil des ans, elle est passée du
stade de simple curiosité illustrant la théorie -- alors nouvelle -- de
la mécanique quantique à celui d'une technique
incontournable pour la caractérisation d'un grand nombre de matériaux.
La RMN est aujourd'hui un outil
essentiel pour la caractérisation à l'échelle atomique ou moléculaire d'un
vaste nombre de systèmes : surfaces métalliques, catalyseurs, polymères, supraconducteurs, verres, cristaux liquides, intermédiaires de synthèse, assemblages
supramoléculaires, produits naturels, médicaments, membranes et protéines, pour
ne citer qu'eux. Elle est au centre des techniques d'analyse standard et a
révolutionné notre approche de la chimie, que ce soit au niveau de la synthèse
ou de l'étude de la dynamique moléculaire.
Ces progrès phénoménaux peuvent
être attribués à deux principaux facteurs. Tout d'abord, l'augmentation du
champ magnétique des aimants RMN -- qui est passé des électroaimants
générant un champ de 0,9 T, correspondant à une fréquence de résonance de 40 MHz pour les protons, à des aimants supraconducteurs créant un champ de 1 GHz
aujourd'hui -- a permis l'analyse de systèmes de plus en plus complexes et a
contribué à l'élargissement du domaine d'application de la RMN. Un autre
facteur de ce développement fulgurant concerne les progrès faits au niveau des
expériences de RMN par des groupes de recherche. À ce titre, on peut citer deux
innovations majeures qui sont intrinsèquement liées. Dans les années 1970,
Richard Ernst (Zurich) -- prix Nobel de chimie en 1991 -- introduisit la RMN
par transformée de Fourier. En réalisant l'acquisition du
signal dans le domaine temporel, puis en faisant la transformée de Fourier de
ce signal au lieu du conventionnel balayage en fréquence, la sensibilité de
l'expérience fut augmentée d'un facteur 100. Ce pas de géant pour la RMN en
amena un autre : en 1971, lors d'une école d'été en Pologne, Jean Jeneer
proposa une méthode qui pourrait conduire à l'acquisition de spectres de corrélation bidimensionnels en tirant
parti de la transformée de Fourier. Ernst fit la démonstration expérimentale de
cette proposition en 1975 et montra qu'il était possible d'établir des
connectivités entre les atomes des molécules.
En quelques années, des dizaines
de séquences RMN sont nées, capables de sonder les connectivités à travers les
liaisons (COSY), à travers l'espace (NOESY), par échange chimique (EXSY) ou
encore entre hétéroatomes (HSQC). Ceci fut la démonstration que
la RMN ne se limitait pas à une méthode pour obtenir les déplacements chimiques
des protons d'une molécule, mais qu'elle pouvait s'adapter à une grande
diversité de problèmes, allant de la structure tridimensionnelle d'une protéine
à la mesure de coefficients de diffusion. La RMN
multidimensionnelle, en combinaison avec la capacité que l'on a à manipuler l'hamiltonien apparent de RMN
(manipuler l'aimantation dans l'espace, ce
qui se traduit au niveau quantique par des rotations de l'hamiltonien dans
l'espace des spins) par des impulsions radiofréquence (notion introduite entre
autres par Andrew, Waugh et Freeman) permet de créer des expériences RMN qui
s'adaptent aux propriétés que l'on veut extraire, de l'affinité d'une enzyme pour un substrat à la dynamique moléculaire d'un catalyseur sur une
surface.
L'un des aspects les plus
excitants de la RMN est que bien que l'on soit absolument certain que de plus
hauts champs vont ouvrir de nouvelles applications (comme cela a toujours été
le cas dans le passé), il est impossible de savoir à l'avance dans quel domaine
cette révolution aura le plus d'impact.
*Nous résumons l'histoire de RMN aux dates suivantes:
Figure 1: Petite histoire de la spectroscopie
RMN
1. Principes de base
1.1. Le moment magnétique:
1.1.1. Définition:
Le noyau d’un atome peut être considéré, en
première approximation, comme une sphère chargée positivement et tournant sur
elle-même. La charge du noyau en rotation, équivalente à un courant électrique,
produit un champ magnétique. Le noyau peut donc être assimilé à un petit aimant
ayant un pôle nord et un pôle sud. Le champ magnétique produit par le noyau est
appelé moment magnétique et noté 𝜇⃗ (figure 1).
Figure 1:
Le noyau possède un moment magnétique qui peut être assimilé en première
approximation à un petit aimant.
Le moment magnétique étant la conséquence de
la rotation des charges du noyau, on peut écrire : 𝜇⃗ = 𝛾. 𝐿⃗⃗ ; où 𝐿⃗⃗ est le moment cinétique du noyau et g est le rapport gyromagnétique (constante
caractéristique d’un noyau donné). Dans un échantillon macroscopique, un grand
nombre de noyaux coexistent. En absence d’un champ magnétique externe, ils sont
orientés de manière totalement statistique (figure 1-2a) et sont animés d’un
mouvement aléatoire par l’agitation thermique. La mécanique quantique décrit le
comportement de 𝜇⃗ à l’aide du nombre de spin I. Pour
un nucléon (proton et neutron), I est égal à ½. Pour les noyaux, le nombre
quantique de spin résulte de la combinaison de l’ensemble des contributions des
nucléons qui le constituent. Lorsque le nombre de masse et le numéro atomique
sont pairs (noyaux pairspairs), I = 0. Tous les autres noyaux ont un spin I ³ 1/2. I est un entier pour les noyaux
impairs-impairs et un multiple impair de 1/2 pour les noyaux impairs-pairs et
pairs-impairs (Annexe 1).
Dans une expérience de RMN, l’échantillon est
plongé dans un champ magnétique intense (plusieurs dizaines de milliers de fois
le champ magnétique terrestre). Sous l’effet de ce champ intense (𝐵⃗⃗ 0), la composante de 𝜇⃗ suivant 𝐵⃗⃗ 0 vérifie :
mz = g.h.m
où m est le nombre quantique
magnétique pouvant prendre les valeurs m = I, I-1, I-2,… -I.
Le nombre de spin I détermine donc le
nombre d’orientations possibles que la projection du moment magnétique d'un
noyau peut adopter dans un champ magnétique externe.
Par exemple, si l’on considère un proton (I =
½) placé dans un champ magnétique, deux états sont possibles :
m = I = ½
ou m = I -1 = - ½ = -I
Conventionnellement, ces deux états
sont appelés : a pour m = +½ et b pour m = -½.
Figure 2 :
Orientations et énergies des noyaux de spin ½ en fonction du module du champ
magnétique externe 𝐵⃗⃗ 0 . (a) Pour B0 = 0, les noyaux sont
orientés de manière aléatoire et ont tous la même énergie. (b) Pour B0 > 0,
m peut prendre les valeurs +½ (état a) ou -½ (état b) ; les orientations, et donc les énergies de ces deux
états sont différentes.
L’équation 1-1 donne donc deux valeurs
possibles 𝜇𝑧 pour le proton:
La figure 2-b illustre les deux
orientations possibles pour un spin ½ dans un champ magnétique statique 𝐵⃗⃗ 0.
1-1-2-Aspect énergétique:
En absence de champ magnétique extérieur, tous
les états de spin possèdent la même énergie. Ils sont dits dégénérés. En présence
du champ magnétique 𝐵⃗⃗ 0, une interaction existe entre 𝐵⃗⃗ 0 et le moment nucléaire 𝜇⃗. L’énergie de cette interaction est :
𝐸𝑚 = −𝜇⃗. 𝐵⃗⃗ 0 = −𝜇𝑧 .𝐵0
Cette énergie dépend donc de
l’orientation de m r par rapport à 𝐵⃗⃗ 0. Elle vaut :
Ainsi, en présence de 𝐵0 la dégénérescence est levée et il existe une
différence d’énergie DE = h.n0 entre deux niveaux d’énergie consécutifs (figure
2b).
L’état de plus faible énergie, et donc le plus
stable, correspond aux noyaux orientés dans la direction du champ magnétique.
Le niveau de plus haute énergie correspond aux noyaux orientés dans la
direction opposée. En présence d’un champ magnétique externe, les noyaux
devraient donc tous être sur le premier niveau. Toutefois, l’agitation
thermique contrarie cette organisation en fournissant à certains noyaux
l’énergie nécessaire pour passer sur les niveaux supérieurs. L’équation de
Boltzmann gouverne alors les populations sur les différents niveaux d’énergie.
Pour un spin ½ :
Compte tenu des énergies mises en jeu
en RMN, ∆𝐸 ≪ 𝑘. 𝑇 et l’approximation suivante est
parfaitement justifiée :
avec N : nombre total de spins détectés,na = + D N / 2 (population du niveau a) et nb = - D N / 2 (population du niveau b).
Le rapport ( ∆ /𝑁)
est par conséquent proportionnel à 𝐵0et au rapport gyromagnétique g. Il est également inversement
proportionnel à la température. Compte tenu des valeurs de 𝐵0 utilisées pour les appareils de RMN, ce rapport est
de l’ordre de 10-5 . A l’équilibre, la population du niveau a est donc légèrement plus élevée que
celle du niveau b.
1.2. Le modèle vectoriel:
1.2.1 L’aimantation:
Comme nous l’avons vu au paragraphe précédent,
les moments magnétiques de spin ½ ne peuvent adopter que deux orientations en
présence d’un champ magnétique externe : l’une sensiblement parallèle à 𝐵⃗⃗ 0 et l’autre sensiblement anti-parallèle (figure 3a).
Le nombre de noyaux parallèles étant
légèrement supérieur à celui des noyaux antiparallèles, la somme vectorielle de
tous les moments magnétiques nucléaires est alors non-nulle et dirigée dans la
direction du champ 𝐵⃗⃗ 0.
Cette somme est appelée l’aimantation
nucléaire et notée 𝑀⃗⃗ (figure 3b).
Le module de l’aimantation peut être calculé à
partir de l’expression du moment magnétique µ ainsi que de la différence de
population entre les niveaux a et b.
Figure 3 :
Orientation des moments magnétiques nucléaires en présence d’un champ
magnétique externe (a). 𝑀⃗⃗ est la somme vectorielle des moments
magnétiques. En présence d’un champ magnétique, 𝑀⃗⃗ est non nulle et dirigée dans la direction de ce champ (b).
Et en tenant compte de l’expression de D, on obtient :
1.2.2. La précession de Larmor:
De plus, lorsqu’un champ magnétique tel que 𝜇⃗ est plongé dans un champ magnétique intense tel que 𝐵⃗⃗ 0, on peut montrer qu’il est animé d’un mouvement de
précession, autour de 𝐵⃗⃗ 0, analogue au mouvement de l’axe
d’une toupie autour de la verticale (figure4).
Figure 4 :
Mouvement de précession : (a) d’une toupie autour de la verticale, (b) d’un
moment magnétique autour du champ 𝐵⃗⃗ 0 .
La vitesse à laquelle ce mouvement de
précession s’effectue est donnée par la relation de Larmor :
Ce mouvement de précession se fait
autour de 𝐵⃗⃗ 0, il ne change donc rien à
l’orientation ou au module de l’aimantation 𝑀⃗⃗.
L’origine de ce mouvement de
précession réside dans le fait que, plongé dans un champ magnétique 𝐵⃗⃗, un moment magnétique µ⃗⃗ subit
un couple :
La solution de ces équations est de
la forme :
mz est constant et mxy tourne autour de 𝐵⃗⃗.
Le vecteur µ⃗⃗ est
donc bien animé d’un mouvement de précession autour de 𝐵⃗⃗.
1.3. La resonance:
1.3.1. Modèle vectoriel:
Comme nous l’avons vu, l’aimantation est
proportionnelle au nombre de noyaux, et c’est elle qui est mesurée en RMN.
Toutefois, 𝑀⃗⃗ n’est pas observable lorsqu’elle est
parallèle à 𝐵⃗⃗ 0 (figure 1-5a), il faut donc la
basculer de 90°.
Pour faire tourner 𝑀⃗⃗, il suffit d’appliquer transitoirement un autre champ
magnétique 𝐵⃗⃗ 1 dirigé à 90° de 𝐵⃗⃗ 0. Les moments magnétiques sont alors animés d’un
mouvement de précession autour de 𝐵⃗⃗ 1. Dès qu’une rotation de 90° a été
obtenue, le champ 𝐵⃗⃗ 1 est coupé (figure 5b).
Figure 5 : 𝑀⃗⃗ est la somme vectorielle des moments magnétiques. En
présence de 𝐵⃗⃗ 0 , 𝑀⃗⃗ est non nulle et dirigée suivant z (a). L’application d’un champ 𝐵⃗⃗ 1 perpendiculaire à 𝐵⃗⃗ 0 provoque la rotation de 90° de tous les moments magnétiques (b). Dès
que 𝐵⃗⃗ 1 n’est plus appliqué, les moments magnétiques
reprennent une polarisation et une précession uniquement gouvernées par 𝐵⃗⃗ 0 mais 𝑀⃗⃗ est alors dans le plan transversal.
La figure 5c montre qu’après
l’application du champ 𝐵⃗⃗ 1, les populations des états a et b sont identiques. Ce qui explique la
disparition d’une aimantation suivant l’axe z.
Par ailleurs, les composantes des
moments magnétiques perpendiculaires à 𝐵⃗⃗ 0 sont distribuées de manière
parfaitement statistique avant l’application de 𝐵⃗⃗ 1 (figure 1-5a).
En revanche, après l’application du
champ 𝐵⃗⃗ 1 (figure 1-5c), un léger excès est observé dans la
direction perpendiculaire à 𝐵⃗⃗ 1 et à 𝐵⃗⃗ 0. Une « cohérence » est apparue entre les
composantes transversales (perpendiculaires 𝐵⃗⃗ 0) des moments magnétiques.
L’aimantation 𝑀⃗⃗ étant la somme de tous les moments
magnétiques nucléaires, elle est alors orientée à 90° de 𝐵⃗⃗ 0 et peut être mesurée.
Toutefois, le champ magnétique 𝐵⃗⃗ 0 est présent en permanence au cours d’une expérience
de RMN. Pendant l’application de 𝐵⃗⃗ 1 l’aimantation est donc animée d’un
mouvement qui est la composition de la précession autour de 𝐵⃗⃗ 0 à la vitesse w0 = g.B0 et de la précession autour de 𝐵⃗⃗ 1 à la vitesse w1 = g.B1. Ce mouvement est en fait une précession autour du
champ 𝐵⃗⃗ = 𝐵⃗⃗ 0 + 𝐵⃗⃗ 1 .
Par ailleurs, 𝐵⃗⃗ 1 doit pouvoir être activé et supprimé rapidement
afin de provoquer une bascule contrôlée de l’aimantation. De ce fait, 𝐵⃗⃗ 1 est beaucoup moins intense que 𝐵⃗⃗ 0, qui est un champ statique (en pratique 𝐵⃗⃗ 1 est environ mille fois moins intense que 𝐵⃗⃗ 0.
Figure 6 :
Action sur l’aimantation 𝑀⃗⃗ d’un champ 𝐵⃗⃗ 1 fixe en présence de 𝐵⃗⃗ 0 . Les flèches indiquent le sens de précession autour de 𝐵⃗⃗ 1 . Au début de l’application de 𝐵⃗⃗ 1 , la précession écarte effectivement l’aimantation 𝑀⃗⃗ de la direction de 𝐵⃗⃗ 0 (a). Mais dès que la précession autour de 𝐵⃗⃗ 0 a provoqué une rotation de plus d’un quart de tour,
l’action de 𝐵⃗⃗ 1 ramène l’aimantation suivant 𝐵⃗⃗ 0 (b).
Si 𝐵⃗⃗ 1 est fixe pendant la durée de son
application, le mouvement de 𝑀⃗⃗ autour de 𝐵⃗⃗ (représenté sur la figure 6), ne permet pas d’amener 𝑀⃗⃗ à 90° de 𝐵⃗⃗ 0. Au début de l’application de 𝐵⃗⃗ 1, la précession autour de ce champ écarte
effectivement l’aimantation 𝑀⃗⃗ de la direction de 𝐵⃗⃗ 0 (Fig. 1-6a). Mais dès que la précession autour de 𝐵⃗⃗ 0 a provoqué une rotation de plus d’un quart de tour,
l’action de 𝐵⃗⃗ 1 ramène l’aimantation suivant 𝐵⃗⃗ 0 (Fig. 6b). Sur cette figure, le référentiel
utilisé, dit référentiel du laboratoire, est constitué de trois axes (x, y et
z) orthogonaux et fixes par rapport au laboratoire. Par convention, l’axe z est
parallèle à 𝐵⃗⃗ 0.
Pour que son action éloigne continument 𝑀⃗⃗ de 𝐵⃗⃗ 0, il faut que 𝐵⃗⃗ 1 tourne lui-même autour de 𝐵⃗⃗ 0 à la vitesse w0, c’est-à-dire à la même vitesse que 𝑀⃗⃗. Ainsi, à tout instant, 𝐵⃗⃗ 1 est placé de telle manière que la précession autour
de ce champ éloigne 𝑀⃗⃗ de 𝐵⃗⃗ 0 (Fig. 7).
Cette condition peut être illustrée
de la manière suivante. Imaginons un enfant sur un manège et son père à côté
désirant l'aider à descendre. Si le manège est à l'arrêt cela ne pose bien
entendu aucun problème, mais l'opération devient plus délicate si le manège est
en marche. En fait le père doit alors courir autour du manège à la même vitesse
que celui-ci de manière à avoir le même mouvement que l'enfant. Le père peut
alors rester en face de l'enfant le temps nécessaire pour l'aider à descendre.
Figure 7 :
Action sur l’aimantation 𝑀⃗⃗ d’un champ 𝐵⃗⃗ 1 tournant autour de 𝐵⃗⃗ 0 à la vitesse w0. Les flèches jaunes indiquent le sens de précession autour
de 𝐵⃗⃗ 1 .A tout instant, la précession autour de 𝐵⃗⃗ 1 écarte l’aimantation 𝑀⃗⃗ de la direction de 𝐵⃗⃗ 0 .
La trajectoire de l’aimantation durant l’application d’un champ 𝐵⃗⃗ 1 tournant est représentée sur la figure 1-8 ; d’une
part, dans le référentiel du laboratoire (Fig. 8a), et d’autre part, dans le
référentiel tournant (Fig. 1-8b). Ce dernier est constitué de trois axes (x’,
y’ et z’) orthogonaux, mais x’ et y’ tournent autour de z’ à la même vitesse
angulaire que le champ radiofréquence 𝐵⃗⃗ 1. Celui-ci est donc immobile dans
le référentiel tournant. Par ailleurs, z’ est confondu avec z et est donc
parallèle à 𝐵⃗⃗ 0.
L’axe z (ou z’) est appelé axe longitudinal et
le plan (xy) ou (x’y’) est appelé plan transversal. A un instant quelconque
d’une expérience de RMN, l’aimantation a une composante parallèle à 𝐵⃗⃗ 0 dite aimantation longitudinale (notée Mz) et une
composante perpendiculaire 𝐵⃗⃗ 0 dite aimantation transversale
(notée Mxy).
Figure 8 :
Trajectoire de l’aimantation 𝑀⃗⃗ durant l’application de 𝐵⃗⃗ 1 ;
ý dans le
référentiel du laboratoire (trois axes (x, y et z) orthogonaux et fixes par
rapport au laboratoire ; z est parallèle à 𝐵⃗⃗ 0 )
ý (b) dans le
référentiel tournant (trois axes (x’, y’ et z’) ; x’ et y’ tournent autour de
z’ à la même vitesse angulaire que 𝐵⃗⃗ 1 et z’ est confondu avec z).
En pratique le champ B1 est la
composante magnétique d’une onde électromagnétique qui doit avoir la fréquence n0 = w0/2p = g.B0 (avec g = g/2p). La fréquence n0 se situe dans la gamme des ondes radio (quelques centaines
de MHz) compte tenu des valeurs de B0 utilisées (de l’ordre de 10 Tesla).
1.3.2. Aspect énergétique:
Des photons de fréquence n0 ont une énergie h.n0 = DE . Lorsqu’un ensemble de spins à l’équilibre (figure
1-9a) est irradié avec cette fréquence, l’absorption des photons permet le
passage de quelques noyaux de l’état a à l’état b, ce qui modifie les populations des différents
niveaux d’énergie du système (figure 9b).
Figure 9 :
Aspect énergétique de la résonance. Les spins sont irradiés avec une onde radio
de fréquence n0 telle que hn0 = DE (a). Ceci permet le passage de quelques noyaux de
l'état a à l'état b (b).
1.4 Relations entre les deux modèles:
Les deux modèles utilisés dans ce chapitre,
vectoriel et énergétique, décrivent la même réalité physique et il est
essentiel, à ce stade, de les mettre en correspondance.
En présence du champ magnétique 𝐵⃗⃗ 0, les noyaux sont polarisés suivant
l’axe longitudinal (axe z, parallèle à 𝐵⃗⃗ 0) et la composante de l’aimantation
nucléaire suivant cet axe est la somme des composantes µz des moments
magnétiques. A l’équilibre, la population du niveau a est légèrement plus élevée que celle
du niveau b, ce qui conduit à une composante longitudinale
dans le même sens que 𝐵⃗⃗ 0.
ý A l’équilibre,
la population du niveau a est légèrement plus élevée que celle
du niveau b ; cela conduit à une aimantation
nucléaire de même direction et de même sens que 𝐵⃗⃗ 0 .
ý (b) Après une
impulsion RF correctement calibrée, les populations des deux niveaux sont
égalisées, l’aimantation est alors perpendiculaire à 𝐵⃗⃗ 0 , la composante de cette aimantation suivant 𝐵⃗⃗ 0 est donc nulle.
ý (c) Si la
quantité d’énergie (fournie au système par l’impulsion RF) est doublée, les
populations sont inversées par rapport à l’état d’équilibre et l’aimantation a
la même direction mais un sens opposé à celui de 𝐵⃗⃗ 0 .
Par ailleurs, la somme des
composantes transversales des moments magnétiques est nulle car il n’y a aucune
polarisation suivant les axes perpendiculaires à 𝐵⃗⃗ 0. L’aimantation est donc de même direction et de même sens que 𝐵⃗⃗ 0 (figure 10a).
Après une impulsion RF correctement calibrée,
les populations des deux niveaux sont égalisées, l’aimantation longitudinale
est donc nulle. En revanche, la somme des composantes transversales des moments
magnétiques ne l’est plus, l’aimantation transversale a alors une valeur égale
à celle de l’aimantation longitudinale à l’équilibre. L’aimantation est alors
perpendiculaire à 𝐵⃗⃗ 0 (figure 10b).
Si l’impulsion RF utilisée est deux fois plus
longue que la précédente (ou de même durée mais deux fois plus intense), deux
fois plus de photons d’énergie hn0 sont absorbés par le système. Les populations des
états a et b sont alors inversées par rapport à
l’état d’équilibre. La population du niveau b est légèrement plus élevée que celle du niveau a, ce qui conduit à une composante longitudinale
de sens opposé à celui de 𝐵⃗⃗ 0.
La somme des composantes transversales des
moments magnétiques est nulle puisqu’il n’y a pas de polarisation suivant les
axes perpendiculaires à 𝐵⃗⃗ 0. L’aimantation est donc de même
direction et de sens opposé à celui de 𝐵⃗⃗ 0 (figure 10c).
1.5. La Relaxation:
Après avoir été basculée dans le plan
transversal, l’aimantation va progressivement retourner à sa position
d’équilibre, parallèle à 𝐵⃗⃗ 0. Les composantes longitudinale et
transversale sont affectées différemment par ce phénomène de relaxation. (annexe
02)
1.5.1. La relaxation longitudinale:
Le retour de l’aimantation longitudinale (𝑀𝑧 ) vers sa valeur d’équilibre se
passe, en règle générale, selon un processus monoexponentiel. On appelle le
temps caractéristique de la croissance de l’aimantation longitudinale le «
temps de relaxation longitudinale ». On le représente par la grandeur « T1 ».
Dans les liquides, les temps de
relaxation longitudinale T1 des protons sont typiquement de l’ordre de quelques
centaines de millisecondes à quelques secondes.
Figure 11 :
Relaxation. Après avoir été basculée dans le plan transversal, l’aimantation va
progressivement retourner à sa position d’équilibre, parallèle à 𝐵⃗⃗ 0 . (a) L’aimantation longitudinale Mz retourne
exponentiellement vers la valeur d’équilibre (M0). (b) L’aimantation
transversale Mxy retourne exponentiellement vers 0.
1.5.2. La relaxation transversal:
Le plus souvent, l’aimantation transversale
décroît mono-exponentiellement. On appelle alors le temps caractéristique de la
décroissance mono-exponentielle le « temps de relaxation transversale ». On
représente ce temps caractéristique par la grandeur « T2 ».
Les temps de relaxation transversale T2
couvrent une gamme de valeurs extrêmement large. Dans les solides, ils peuvent
être plus courts que la milliseconde, alors que, dans les liquides, ils sont
proches des T1 et sont donc de l’ordre de quelques centaines de millisecondes à
quelques seconds.
1.5.3. Influence de l’inhomogénéité
de B0
En réalité, dans le cas des systèmes
de spins caractérisés par un temps de relaxation transversale long (par exemple
dans les liquides), la décroissance de 𝑀𝑥𝑦 est rarement uniquement due à la
relaxation transversale. Elle a généralement une double origine, l’une liée à
la relaxation transversale du système de spins, l’autre liée à l’inhomogénéité
du champ magnétique statique sur le volume observé. L’inhomogénéité du champ
magnétique cause en effet une dispersion des fréquences de résonance. La
fréquence de précession varie alors un peu d’un point à l’autre de
l’échantillon et il apparaît très rapidement un décalage entre les moments
magnétiques. Ils tournent dans le plan (xoy) en pointant des directions de plus
en plus différentes, les plus rapides prennent de l’avance sur les plus lents.
L’aimantation, qui est la somme vectorielle des moments magnétiques, est donc
réduite. Par similitude avec le concept de temps de relaxation transversale T2,
un temps de relaxation T2* a été introduit qui décrit la vitesse de la
décroissance du signal nucléaire en présence d’inhomogénéité du champ
magnétique :
Ici, ∆𝐵𝑜 caractérise l’inhomogénéité du champ
magnétique statique.
Il y a une distinction importante
entre ces deux contributions à la décroissance du signal de précession libre.
La relaxation transversale, liée aux fluctuations du champ magnétique local,
est un phénomène irréversible. En revanche, l’effet de l’inhomogénéité de 𝐵𝑜 est en principe réversible, les
spins restant soumis au même champ magnétique statique tout au long d’une
expérience, pour autant qu’il n’y ait pas de déplacement significatif des spins
pendant le temps équivalent au temps de relaxation T2 (par exemple suite à la
diffusion moléculaire).
1.6. L’expérience de RMN:
Compte tenu des principes énoncés
précédemment, l’expérience RMN de base peut être décomposée comme suit :
· Une période d’excitation constituée par une impulsion
radiofréquence dont la fréquence nr est proche des fréquences de résonance de
l’échantillon et dont l’amplitude et la durée sont calibrées de manière à
produire une bascule de l’aimantation dans le plan transversal (rotation de 90°
de l’aimantation).
· Une période de détection du signal
RMN.
Figure 12 :
Séquence de base pour la spectroscopie RMN ; après une impulsion RF de durée
PW, le signal est détecté pendant la durée AQ.
L’origine du signal RMN peut être appréhendée
soit à partir du modèle énergétique, soit à partir du modèle vectoriel.
1.6.1. Le signal RMN dans le modèle
énergétique
L’impulsion RF perturbe le système, et lorsque
l’irradiation cesse, le système retourne vers son état d’équilibre (par la
relaxation). Pour cela, des noyaux repassent de l’état b à l’état a, et ce faisant, émettent des photons
d’énergie DE et donc de fréquence n0 qui sont détectés (figure 1-13a). Le nombre de
photons émis est égal au nombre de noyaux qui retournent de b vers a, il est donc égal à DN. L’amplitude du signal est donc
directement proportionnelle à DN.
1.6.2. Le signal RMN dans le modèle
vectoriel :
Après avoir été basculée à 90° de 𝐵⃗⃗ 0, l’aimantation tourne autour de celui-ci à la
vitesse w0 (car 𝐵0
est toujours présent). Afin de mesurer la valeur de 𝑀 il suffit alors de placer, perpendiculairement à l’un
des axes du plan transversal, une bobine conductrice.
Les principes de base de
l’électromagnétisme permettent de montrer que la tension aux bornes de la
bobine est alors proportionnelle à la variation du flux de 𝑀⃗⃗ à travers cette même bobine. Le flux est lui-même
proportionnel à la projection de 𝑀⃗⃗ sur l’axe de la bobine. Si au début
de la détection du signal (t = 0), l’axe de la bobine est perpendiculaire à
l’aimantation 𝑀⃗⃗ (figure 13), la projection de 𝑀⃗⃗ sur cet axe évoluera de manière sinusoïdale . Le flux
suivra la même loi et sa variation évoluera comme la dérivée d’un sinus,
c’est-à-dire en cosinus. La rotation de 𝑀⃗⃗ fait donc naître dans la bobine un
signal électrique de fréquence n0 et dont l’amplitude initiale est directement
proportionnelle à M, et donc à DN.
On appelle ce signal le « signal de
précession libre » ou FID pour « Free Induction Decay ».
Il décroît dans le temps (figure 13c)
car M retourne progressivement vers sa position d’équilibre parallèle à 𝐵⃗⃗ 0 (Cf. § 1.5).
Pour des raisons purement techniques, ce
signal est démodulé avant d’être numérisé par l’informatique du spectromètre.
La démodulation consiste à mélanger au signal détecté la fréquence du
référentiel tournant (nr) afin d’obtenir un nouveau signal dont la pulsation est
Figure 13 :
Détection du signal RMN. Dans le modèle énergétique, lors du phénomène de
relaxation des noyaux repassent de l’état b à l’état a, et ce faisant, émettent des photons d’énergie DE (et donc de fréquence n0) qui sont détectés (a). Dans le
modèle vectoriel, le flux magnétique à travers la bobine (proportionnel à la
composante de M suivant l’axe de la bobine) varie périodiquement (b), ce qui
induit dans la bobine un signal électrique de fréquence n0 (c).
1.6.3. Du signal au spectre RMN:
le signal RMN ne contient que très
rarement une seule fréquence. En pratique, il est constitué d’un grand nombre
de fréquences différentes toutes détectées simultanément. Pour la plupart des
applications de la RMN, il est indispensable de séparer ces fréquences afin de
déterminer leurs intensités respectives, c’est ce que réalise la transformation
de Fourier (Figure 14).
Figure 14 : Le signal RMN détecté (a) et le spectre obtenu après transformation de Fourier
Les
utilisations de la résonance dans la vie pratique sont très nombreuses,
notamment dans les domaines médical et pharmacologique.
Dans
ce chapitre, nous examinerons, par exemple, ses applications dans l'analyse de
médicaments et de compléments alimentaires.
La
Résonance Magnétique Nucléaire (RMN) est un outil puissant, non destructif, qui
a trouvé des applications diversifiées en chimie, biochimie, biologie ou médecine.
Pour le chimiste, la RMN est surtout connue comme un outil privilégié pour la
détermination structurale sur un produit purifié ; mais cette technique
peut également permettre d'obtenir des informations précieuses pour l'analyse
de mélanges. Les médicaments pouvant être considérés comme des mélanges
complexes (composés de plusieurs substances différentes avec des constituants
pouvant être simultanément présents en grandes et très faibles quantités), la
RMN est donc un excellent outil pour l'étude de telles formulations.
Malheureusement, elle est traditionnellement considérée comme ayant une
sensibilité limitée par rapport à celle d’autres techniques d'analyse.
Néanmoins, les avancées technologiques ont permis une amélioration des niveaux
de sensibilité, en particulier grâce aux progrès dans l'instrumentation
(cryosonde) et au développement de séquences d'impulsions.
Généralement,
les méthodes de prédilection pour l'analyse de mélanges ainsi que la détection
de traces sont les méthodes chromatographiques, couplées à des méthodes
spectroscopiques telles que la spectroscopie UV-Visible, la spectrométrie de
masse , ou plus rarement la RMN.
La
méthode de RMN DOSY (Diffusion Ordered SpectroscopY) est, elle, basée
uniquement sur la RMN ; elle permet l'analyse précise d'un mélange complexe
sans séparation préalable des différentes composantes. La méthode permet de
mesurer les coefficients d'autodiffusion translationnelle des molécules dans
une solution. Les spectres des différents composants du mélange peuvent être
séparés en fonction de la valeur de leurs coefficients de diffusion apparents.
De plus, cette méthode non destructive peut facilement être automatisée et
standardisée.
Cet
article décrit l'utilisation de la méthode DOSY appliquée à l'analyse de faux
médicaments ou de compléments alimentaires dits "naturels".
La
RMN DOSY est une expérience de RMN à deux dimensions . Une dimension correspond
classiquement aux déplacements chimiques RMN et l'autre dimension aux coefficients
de diffusion. L'utilisation de la RMN pour mesurer les coefficients
d'auto-diffusion (ou diffusion translationnelle) des molécules dans des
solutions est basée sur un gradient de champ pulsé (PFG) et une expérience
d'écho de spin stimulé (STE).
.
Figure. 1 : Représentation schématique du
principe de l'expérience DOSY enregistrée sur une formulation de faux
médicament antimalarien .
En
règle générale, une série d'expériences à une dimension PFG-STE est acquise
avec variations systématiques de l'amplitude des impulsions de gradient (Figure
1-A). Le taux de décroissance du signal est directement lié au coefficient de
diffusion D, qui dépend de la masse molaire et d'autres propriétés
hydrodynamiques (taille, forme, charge) ainsi que de son environnement
(température, état d'agrégation). Le coefficient de diffusion (D) peut donc
être estimé par l'analyse de la décroissance exponentielle du signal. Les
signaux de petites molécules (D élevé) diminuent plus rapidement que ceux des
grosses molécules (D faible) lorsque le gradient de champ pulsé est incrémenté
(Figure 1-A, B). La transformée de Fourier du signal de RMN et la transformée
de Laplace inverse de la décroissance des signaux (Figure 1-C) conduisent au
spectre DOSY sur lequel les déplacements chimiques (δ en ppm) sont situés sur
l'axe horizontal tandis que les coefficients de diffusion sont sur l'axe
vertical (D en μm2.s) (Figure 1-D). Toutes les taches appartenant à
la même espèce sont alignées et les coefficients de diffusion peuvent être
mesurés.
Les
expériences de RMN DOSY décrites dans cet article ont été mises en œuvre après
avoir extrait le médicament réduit en poudre (contenu d'une gélule ou comprimé
broyé) dans un solvant deutéré par agitation mécanique et sonication.
3. Intérêt de cette méthode pour
l'analyse de médicaments
Cette
technique qui n’est pas encore utilisée en routine pour le contrôle des
médicaments, a l'avantage d'être une méthode globale d'analyse permettant de
travailler sans a priori sur un mélange, car l’échantillon est caractérisé par
une empreinte spectrale qui lui est spécifique. Les médicaments sont des
mélanges complexes, composés non seulement de principe(s) actif(s) mais
également de différents excipients. Les excipients les plus couramment observés
par RMN dans les médicaments peuvent être de diverse nature: agents liants,
diluants, plastifiants ou conservateurs. En RMN du proton, tous les composés
contenant des protons seront détectables dans la solution analysée, que leur
présence soit attendue ou non. L'avantage des techniques de RMN par rapport aux
méthodes chromatographiques conventionnelles est leur non-sélectivité qui
permet d'avoir une information sur l'ensemble de la formulation. Notre équipe a
montré l'intérêt de cette méthode dans la caractérisation de différents
médicaments.
3.1
Analyse de faux médicaments
De
nombreux médicaments ont été analysés par cette méthode (ciprofloxacine,
Prozac, Cialis, antipaludiques, Viagra). Les médicaments ont été achetés soit
sur internet, soit directement dans divers pays. Parmi les différents
médicaments analysés, nous avons trouvé des formulations surdosées ou d'autres
contenant des composés chimiques frauduleusement ajoutés dont certains pour
lesquels aucune donnée pharmacologique ou toxicologique n'était connue.
Figure. 2 : Spectres RMN DOSY de formulations
de Viagra. A gauche, la formulation originale Viagra® (Laboratoires Pfizer) et
à droite une contrefaçon en provenance de Syrie.
Une
illustration est présentée dans la Figure 2 ; il s'agit de deux
formulations de Viagra. La première est la formulation originale commercialisée
par les laboratoires Pfizer, la seconde est une copie commercialisée en Syrie.
Même si dans les deux cas le principe actif, (sildénafil) est présent, il
apparaît clairement les différences de composition. En effet deux des
excipients observés dans la formulation originale, le lactose et la triacétine,
sont absents de la formulation syrienne dans laquelle on trouve par contre la
présence de polyethylène glycol (PEG). La technique peut presque être
considérée comme une technique de déformulation dans la mesure où elle permet
d'avoir une information sur l'ensemble des constituants présents dans un
médicament, excepté s’ils ne contiennent pas de proton (un excipient comme le
talc par exemple ne sera pas détecté) où s’ils sont à l'état de trace.
3.2 Analyse de compléments alimentaires
Les
compléments alimentaires sont des produits intermédiaires entre les médicaments
et les aliments traditionnels dont la consommation est en hausse, en particulier
dans les pays industrialisés. Les compléments alimentaires que nous avons
analysés étaient censés contenir des extraits de plantes et, pour certains
seulement des vitamines, des acides aminés et des composés minéraux.
Nous
nous sommes intéressés à deux types de compléments alimentaires : d'une
part des compléments amaigrissants et d'autre part des compléments pour traiter
le dysfonctionnement érectile. Dans ces derniers, nous avons trouvé des
formulations qui avaient été frauduleusement contaminées par des composés
synthétiques potentiellement dangereux. Il s'agit de composés analogues de
principes actifs connus tels que le sildénafil, mais sur lesquels des
modifications chimiques mineures ont été introduites, probablement dans le but
de passer au travers de possibles contrôles qualités effectués par screenings
ciblés.
Dans
le cas des compléments alimentaires amaigrissants, plusieurs formulations
analysées contenaient un principe actif anorexigène, la sibutramine. Pour
illustration, la Figure 3 montre le spectre d'une formulation chinoise censée
contenir des extraits de produits naturels à base de pommes. On repère très
facilement dans le spectre DOSY non seulement la présence de sibutramine
frauduleusement rajoutée, mais également celle de phénolphtaléine, un agent
laxatif cancérigène.
Fig. 3 : Spectre
RMN DOSY d'un amaigrissant dit « naturel » mais contenant pourtant deux
composés actifs synthétiques, la sibutramine (un coupe-faim) et la
phénolphtaléine (un laxative).
4. Conclusion
L'avantage
de la RMN DOSY est de donner une signature spectrale de la globalité du
médicament. Suivant la formulation du médicament, son empreinte spectrale sera
différente. Il est donc possible, à partir d'un spectre DOSY, de voir si un
médicament contient bien le principe actif annoncé, s’il s’agit d’une copie
parfaite ou approximative de la spécialité pharmaceutique, comment il a été
fabriqué… En permettant une analyse rapide des "images" des
différentes matrices (similitudes et/ou différences), la RMN DOSY est un outil
potentiel de traçabilité.
Comme
la RMN DOSY peut s'appliquer à l'analyse de divers mélanges complexes, il
pourrait être intéressant, tout en restant dans une application aux fraudes de
composition, d'étudier ses potentialités dans la lutte contre la contrefaçon de
la parfumerie et des cosmétiques.
Conclusion
générale:
Les domaines
d'application de la RMN sont très variés
et concernent l'analyse structurale des substances organiques en solution, la
caractérisation des matériaux organiques et inorganiques à l'état solide et
l'imagerie par résonance magnétique (IRM).
La
RMN des liquides est un outil de base pour l'étude des petites molécules
organiques en solution, substances naturelles ou synthétiques, et l'étude des
macromolécules solubles (protéines, acides nucléiques, polysaccharides, polymères
synthétiques).
La
RMN des solides permet d'étudier des substances amorphes ou faiblement
cristallines telles que les verres et les polymères naturels ou synthétiques
insolubles ; c'est une technique très complémentaire de cristallographie par
rayons X. Une technique similaire est destinée à l'étude d'échantillons
hétérogènes très variés tels que les supports solides pour la synthèse
organiques ou les sols pour une caractérisation environnementale.
L'IRM, telle qu'elle est pratiquée dans le cadre d'un
laboratoire de RMN conventionnel, peut être qualifiée de micro-IRM car elle est
adaptée à l'étude d'échantillons de la taille du centimètre avec une résolution
de quelques dizaines de micromètres. Elle est applicable à l'étude des
matériaux et des tissus biologiques, en particulier pour le suivi au niveau
tissulaire des stratégies thérapeutiques.